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Nicolas Leron : auteur de "Souveraineté, l'obsession des nations", un ouvrage sur le renforcement de la démocratie en Europe


Heure de publication : 09:30 - Temps de lecture : 9 mn

Essayiste et militant politique, Nicolas Leron sort un nouvel ouvrage : "Souveraineté, l'obsession des nations". – © Nicolas Leron.

Propos recueillis par Jean-Etienne Dirney

"Souveraineté, l'obsession des nations". C’est le titre du nouvel ouvrage du Français Nicolas Leron, essayiste et militant politique, publié par la maison Bouquins à Paris. Dans une interview qu’il a bien voulu nous accorder, il a déclaré que son « livre fait la critique d’un double écueil qui est comme les deux faces de la même pièce : l’obsession de la souveraineté ». Politiquement très engagé, il pense qu’il revient « à notre génération de construire une nouvelle force politique et de participer à la refondation d’un grand mouvement de progrès, d’humanisme et de démocratie ». Selon lui, « la démocratie, à l’inverse de la souveraineté, peut exister à plusieurs échelles : la démocratie locale, la démocratie nationale et la démocratie européenne ». Entretien.

Présentez-vous à nos lecteurs et internautes ?

 

Je suis Nicolas Leron, essayiste et militant politique. Je suis le secrétaire général du nouveau parti politique Education, Démocratie, Dignité (EDD), présidé par le Député français Sébastien Nadot.

Mon engagement dans la création du parti EDD s’inscrit dans le droit fil de mes attachements politique et intellectuel : si les partis existants ne m’inspirent plus l’envie d’y adhérer, je ne peux me résoudre à abandonner la politique. Je crois dans la démocratie parlementaire, qui implique nécessairement les partis politiques. Comme toutes organisations, les partis politiques naissent, vivent et meurent – de nécrose ou de leur belle mort. À notre génération, aujourd’hui, de construire une nouvelle force politique et de participer à la refondation d’un grand mouvement de progrès, d’humanisme et de démocratie.

Attaché depuis toujours à la politique et aux idées, à la gauche social-démocrate et à la question européenne, j’ai milité une dizaine d’années au Parti socialiste et, plus encore, au Parti socialiste européen. Puis, comme beaucoup d’autres, je me suis désengagé du PS, par déception. J’ai donc poursuivi mon engagement dans les cercles de réflexion, de la Fondation Jean-Jaurès à Terra Nova, dans les revues intellectuelles comme Le Débat, Esprit, Le Grand Continent ou encore la revue Germinal, et par la publication d’essais (La Double démocratie. Une Europe pour la croissance, Seuil, 2017, avec l’économiste Michel Aglietta, et Souveraineté, l’obsession des nations, Bouquins, 2022).

Mon parcours professionnel est à l’image de ce double intérêt pour la politique et les idées : côté politique, j’ai été permanent au siège national du PS, chargé de mission dans un think tank et collaborateur parlementaire ; côté idées, à la suite de mon doctorat en science politique, j’ai enseigné les questions européennes à l’université et je suis aujourd’hui chercheur associé au Cevipof et à l’OFCE, deux centres de recherche de Sciences Po Paris. J’ai également eu la chance de travailler pour une entreprise sociale dédiée à l’inclusion économique des jeunes diplômés des quartiers populaires, et de découvrir ainsi les questions d’emploi, de formation et d’insertion, et le rôle que peuvent jouer les entreprises en matière d’inclusion de la diversité et donc de cohésion sociale et républicaine.

 

"Souveraineté, l'obsession des nations" (éditions Bouquins). C'est votre nouvel ouvrage. Que contient-il et qu’est-ce qui justifie un tel projet littéraire ?

 

Mon livre fait la critique d’un double écueil qui est comme les deux faces de la même pièce. Cette pièce, c’est l’obsession de la souveraineté.

Le premier écueil est le souverainisme. Le souverainisme croit, ou fait semblant de croire, que c’est en rapatriant toute la souveraineté, en récupérant les morceaux épars de souveraineté qu’on aurait laissés se disperser en Europe, à Bruxelles, qu’on pourra recouvrer notre puissance pleine et entière, qu’on pourra à nouveau être maître de notre destin. Ça veut dire quitter l’Union européenne, quitter l’OTAN, se défaire de tout engagement international. Seulement, ce que ne dit pas le souverainisme, c’est que la France, seule, qu’on le veuille ou non, n’est plus à l’échelle du XXIe siècle qui est le siècle des Etats-continents comme les Etats-Unis, la Chine ou la Russie. Le souverainisme est un défaitisme.

L’autre écueil est la souveraineté européenne, qui n’est pas un défaitisme, mais une chimère. Parce que dire que la France ne sera vraiment souveraine qu’au travers d’une souveraineté européenne ne veut rien dire. On nage dans la confusion conceptuelle. La souveraineté ne se divise pas, elle ne se dédouble pas avec une souveraineté nationale et en même temps une souveraineté européenne. Le « en même temps » macroniste ne marche pas ici.

Ces deux écueils, souverainisme et souveraineté européenne, portent également un risque politique majeur. C’est celui de dire aux Français que, au fond, ils ne sont plus souverains : à cause de l’Europe qui entame la souveraineté nationale, pour les souverainistes ; à cause de l’Europe, qui n’est pas encore souveraine, pour les défenseurs de la souveraineté européenne. La souveraineté, finalement, est toujours à venir ; elle n’est plus au présent.

Ce que je défends, c’est que la souveraineté n’est pas le problème, elle n’est pas la cause de nos maux, ni notre planche de salut. La France est un Etat souverain. Elle peut très bien décider souverainement de quitter l’Union européenne, et d’en assumer ensuite, bien entendu, les conséquences de ce choix.

En revanche, derrière cette obsession, cette obnubilation de la souveraineté, se cache le problème fondamental que connaissent nos sociétés : l’impuissance démocratique. Notre bulletin de vote ne trouve plus le relai en termes de politiques publiques structurantes capables de produire des biens publics (sécurité, justice, santé, éducation, écologie, innovation…) en accord avec la préférence des citoyens. La crise en Europe, et donc en France, est d’abord une crise du politique avant d’être une crise de l’économique.

Je propose une troisième voie : la double démocratie européenne. Car la démocratie, à l’inverse de la souveraineté, peut exister à plusieurs échelles : la démocratie locale, la démocratie nationale et la démocratie européenne. Ce qui suppose d’instituer une démocratie européenne authentique, par seulement formelle, mais substantielle, avec un véritable budget politique européen abondé par des ressources fiscales européennes propres.

 

Plusieurs Etats se cachent aujourd'hui derrière la souveraineté pour bâillonner leur peuple, violer les droits humains et débrancher la démocratie et l'Etat de droit. Votre livre en parle justement. Comment vous expliquez cette situation ?

 

L’obsession de la souveraineté permet, inconsciemment ou consciemment, de ne pas parler du problème fondamental de nos sociétés européennes comme africaines : la question démocratique. Les atteintes à la démocratie ne sont pas l’apanage des pays d’Afrique. Nous vivons en Europe une régression démocratique extrêmement préoccupante. En France, l’Etat ne respecte plus les droits fondamentaux de la personne humaine pourtant garantis dans la Constitution française. Il faut voir comment les migrants sont traités en France. Le Député Sébastien Nadot, qui a présidé la Commission d’enquête de l’Assemblée nationale française sur les migrants, parle de « maltraitance systémique d’Etat » à l’encontre des migrants. Ces atteintes aux droits fondamentaux et à la dignité de la personne humaine valent également pour les Françaises et les Français précaires. Nous vivons une crise de la dignité en France.

La souveraineté permet aussi à la France de soutenir des dictatures en Afrique, sur le dos des peuples d’Afrique qui revendiquent la démocratie. Regardons toutes les élections présidentielles en Afrique de l’ouest ou du centre dont les résultats ont été piétinés par les régimes en place : Togo, Bénin, Guinée, Gabon, Congo, République démocratique du Congo… Regardons la passation de pouvoir dynastique au Tchad, au mépris de la Constitution tchadienne. Les chefs d’Etat allèguent de la souveraineté pour mieux fouler du pied la démocratie des peuples.

Avec la multiplication des crises de tous genres dans le monde, quel avenir pour la démocratie ?

La démocratie est en péril, en tout point de la planète. A nous, défenseur de la démocratie, de se mobiliser et de mener ensemble le combat, notamment en Afrique et en Europe. Le combat se mène des deux côtés de la Méditerranée, ensemble.

 

Où trouver votre livre et à quel prix ?

 

Dans les librairies françaises et sur Internet. Son prix est 18 euros.

 

Avez-vous un dernier mot ?

 

Le parti EDD présentera des candidats pour la 9e circonscription et la 10e circonscription législative des Français de l’étranger. La 9e circonscription comprend les pays d’Afrique du nord et d’Afrique de l’ouest. La 10e circonscription comprend le reste de l’Afrique et le Moyen-Orient.

Nous lançons un appel à tous les franco-africains qui vivent en Afrique pour qu’ils s’inscrivent sur les listes électorales françaises consulaires en Afrique, afin de recueillir un maximum de votes sur ces deux circonscriptions et se donner ainsi la possibilité d’élire deux députés aux couleurs de EDD qui porteront à l’Assemblée nationale française le combat pour une autre vision des rapports entre l’Afrique et l’Europe.

Pour s’inscrire sur les listes électorales françaises consulaires en Afrique, il suffit de pouvoir justifier d’une résidence en Afrique. Attention : le temps presse ! Il faut faire cette démarche en avril, car ensuite il sera trop tard. Voici le lien pour faire la démarche en ligne : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroitsF33307. Nous avons créé une page Facebook pour la campagne d’inscription : https://www.facebook.com/inscriptionsurleslisteselectoralesenafrique/. Et voici l’adresse du site du parti EDD pour nous contacter : https://edd-education-democratie-dignite.hubside.fr/


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