Tanzanie : une école de la 2ème chance pour les adolescents déscolarisés
Heure de publication : 23:30 - Temps de lecture : 2 min 33 s
Grâce au Projet d’apprentissage alternatif et de développement des compétences, Hadia Baruti Wimbi sait désormais lire, écrire et compter. – © BAD - Photo de la Une : deedeeparis
Texte par : BAD
Hadia Baruti Wimbi n’avait que 6 ans quand elle a quitté la maison de ses parents. Elle raconte : « Une vieille femme de ma famille est venue voir mes parents, leur a demandé si elle pouvait m'emmener avec elle. Elle leur a promis de m’inscrire à l’école. Quand elle est devenue ma tutrice, elle a inscrit ses enfants à elle, mais pas moi ». La jeune fille semblait condamnée à suivre le même chemin que nombre de ses pairs en Tanzanie, où beaucoup de jeunes n’ont pas les compétences requises sur le marché du travail. Heureusement, Hadia a pu changer le cours de sa vie, grâce à un oncle et à un projet défendu par le Fonds africain de développement.
« J’avais 13 ans, se souvient la jeune femme, 21 ans aujourd’hui. Il est venu me chercher et m’a confiée à une enseignante ». Mais la partie n’était pas gagnée pour autant : « Il m’a fallu un an pour la convaincre d’aller à l’école, raconte Fatima Rashid Ali, l’enseignante qui l’a recueillie. Elle ne voulait pas y aller, car elle avait le sentiment d’être trop vieille ». Et d’expliquer : « Je lui ai dit qu’une école traditionnelle ne lui conviendrait pas, mais que je connaissais un centre qui proposait une autre manière d’apprendre. »
Signe du destin ? Hadia Wimbi a pu bénéficier du Projet d’apprentissage alternatif et de développement des compétences, auquel le Fonds africain de développement a octroyé 32,7 millions de dollars, afin de construire deux centres de formation professionnelle. Le Raha Leo Alternative Learning Center est l’un d’eux. C’est là que Hadia a pu s’ouvrir à de nouveaux horizons. Bien plus âgée que les autres élèves du niveau primaire, Hadia souffrait pourtant de gros retards d’apprentissage à son arrivée. « Si je n’étais pas venue ici, j’aurais passé ma vie à faire des travaux domestiques », dit-elle sur un ton grave. Puis elle sourit : « Maintenant, je sais lire et écrire. Je sais que quand j'aurai terminé mes études, je pourrai créer ma propre entreprise. Je suis si heureuse d'avoir étudié ici ! »
Ils sont des centaines d’autres à avoir pu profiter, comme Hadia, du Projet d’enseignement alternatif et de développement des compétences. Ne comptant qu’une douzaine de pensionnaires à leur ouverture, les centres d’apprentissage dédiés comptent aujourd’hui plus de 2 000 élèves, qui y bénéficient d’un enseignement de base. « Nous n'avions que 32 élèves dans le centre d'apprentissage alternatif de Raha Leo quand nous avons ouvert, en 2006. Tous avaient quitté l'école, près de 95 % étaient séparés de leur famille. Aujourd'hui, nous essayons de nous rapprocher d'eux, de leur témoigner de l’affection et de leur apprendre des choses », explique Kazija Salmin Ufuzo, professeure de swahili et de mathématiques. Pour elle, l'objectif est clair : apprendre aux élèves à lire, à écrire et à maîtriser les bases de calcul. Mais on leur propose aussi d’acquérir d'autres compétences : « Nous avons lancé des formations en ménage, en maintenance informatique, en agriculture, en menuiserie, en électricité, en cuisine et en couture », précise l’enseignante.
D’après Madina Mjaka Mwinyi, assistante principale au ministère tanzanien de l’Enseignement et de la Formation professionnelle, 85 % des jeunes formés dans ces centres professionnels ont créé leur entreprise. Aujourd’hui, la Tanzanie compte une douzaine de centres d’apprentissage et de formation professionnelle de ce type, qui changent la vie d’adolescents et de jeunes gens qui, autrement, ne seraient sans doute jamais allés à l’école.
Grâce au soutien du Fonds africain de développement, plus de 6 000 microcrédits à taux zéro ont été accordés à des étudiants tanzaniens – dont plus de 70 % de femmes – pour qu’ils puissent créer leur entreprise.